"MEDIA-CHAUD" ENTRETIEN avec...
Entretien à "chaud" concernant : Le Miel au Yémen, diffusion sur France2, Envoyé spécial, jeudi 3 juillet 2008, à 21h30, durée 30 mns
Nota : Nous avons questionné une personne, une dame française de 58 ans, bonne connaisseuse du monde Arabe, du Yémen (ayant fait plusieurs séjours dans ce pays), amie de la Nature et des Hommes, humaniste et que nous pensons « sage « , réservée et très objective. Pour des raisons d’étique et de confidentialité, nous respectons son souhait, et ne communiquons que ses initiales A. T. Cet entretien fort sérieux a été réalisé « à chaud » le 3 juillet au soir après la diffusion de ce reportage, que nous diffusons ce matin.
RDS : Madame, que pensez-vous de ce reportage ?
A.T. : Ce film diffusé à très grande audience est fort intéressant du point du vue du « Miel », mais professionnellement d’une grave légèreté.
RDS : selon vous est-ce un sujet « accrocheur » ?
AT : sans doute, le thème de la soirée est intitulé « carnet de voyages » (ndrl : attrape/fourre tout, c’est à la mode et d’époque), il y avait une palette intéressante pour cette soirée et un peu tout le monde : la folie des paquebots géants (…), les Maldives, paradis en péril/poubelle, le miel du Yémen, les jobs d’été chez les jeunes. Bon. Le sujet sur le miel, le troisième, est un thème à la mode ; en France on adore aussi les abeilles et le miel, ça fait écolo (gique), et exotique, et puis on parle d’un pays lointain : le Yémen, toujours mal connu, et très beau. Donc, il y a donc la garantie en plus d’un beau sujet d’avoir de belles images, mais…
RDS : mais, vous semblez fâchée, en colère, expliquez nous vos réactions. (ndrl : nous vous connaissons depuis des années, extrêmement posée).
AT : Sous couvert d’un joli thème « le miel du Wadi Yémen », les journalistes enquêtant dans la région appropriée dévient très rapidement sur les clichés habituels, avec des dérives inadmissibles et « faciles ». C’est lourd, pour un journaliste digne de ce nom (et pour une grande chaîne française France2), de cautionner ce genre de reportage, car le sujet n’est pas étayé. « On dit que la rumeur des gains du miel, 6000 tonnes par ans, des millions de dollars… alimente les réseaux terroristes … », et tout cela en essayant d’aller DANS le village de Ben Yémen !!! Enfin, quelle indécence ! Au Yémen, la presque totalité des gens n’a que faire de Ben Yémen ; les Yéménites, loin d’être stupides comme des moutons (ce qu’on laisse croire, cf. séquence sur le Coran/les Abeilles) et « ne sont en aucun » cas associés et solidaires à ses mouvements. Ils le réfutent ! Alors pourquoi un tel reportage « fouille M…. » ? Le journaliste essuyant le refus de son guide et des autorités locales (Wadi Doân), insiste en interrogeant un entrepreneur à Sanaa, ainsi que le ministre de l’information… L’homme d’affaire (barbu, et incriminé à cause de son nom) ne dit rien de plus, tout comme le ministre (légèrement barbu). Et puis il y a deux entretiens en caméra cachée (c’est la grande mode) qui disent des choses intéressantes aussi, mais doit-on cautionner un tel reportage qui effleure un sujet sans aller au bout des choses et des raisonnements ?
RDS : vous considérez que c’est un sujet accrocheur (le miel) et y , c’est-à-dire, sous couvert du thème du miel, on bifurque vers le sensationnel, l’islam, le terrorisme ?
AT : oui bien sûr, pourquoi un tel amalgame ? Tous les vendeurs de miel seraient des islamistes, ou soutiendraient le terrorisme ? Pour des esprits simplistes (et ça passe très bien dans les médias), ça crée le trouble, pire l’opprobre sur un pays, encore une fois ! ça me gêne et me met en colère ! C’est très grave de procéder ainsi, et même inadmissible. C’est très facile de parler d’un pays, de l’islam, des coutumes, de fonctionner sur des « clichés » autres que les nôtre, et c’est ainsi qu’on entretient « la différence », le doute, la crainte, le mépris et parfois la haine, hélas. C’est grave, lâche, maladroit et injuste.